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Ne livrons pas les élèves au Livret de compétences
Article publié le 27 juin 2011

Notre brochure "spéciale livret de compétences"

AU SOMMAIRE

1-2 Présentation du Livret Pesonnel de Compétences

3-4 Histoire de la mise en place du LPC

5-7 L’évaluation par compétences : éclairages pédagogiques

 : L’évaluation en pédagogie Freinet

 : Livret de compétences contre auto-socio construction des savoirs ?

10-13Les enjeux du LPC

 : Un projet du Medef pour l’école

 : De la normalisation des comportements

 : Le livret de compétences : une application numérique pour un casier scolaire ?

14-15 Position de SUD Éducation
 : Non à la mise en place de casiers scolaires ! Ne livrons pas les élèves au livret personnel de compétences ! (Communiqué de SUD Éducation)

16La situation dans les collèges de l’Académie de Créteil

PRESENTATION DU LPC

Encore aujourd’hui beaucoup de collègues, du premier comme
du second degré, ne savent pas exactement ce qu’est ce livret de
compétences, comment il se présente, qui doit le valider... sans parler
des interrogations de fonds sur les enjeux pédagogiques et politiques
d’un tel outil. Avant d’aborder ces enjeux cruciaux et d’expliquer
nos critiques vis à vis de ce livret, nous nous proposons d’en faire la
présentation telle qu’elle est relayée par les chefs d’établissements, les
IPR (Inspecteur Pédagogique Régional) chargés de le mettre en place.

QUAND ?

Pour l’instant, le livret de compétence doit être validé à trois moments de la scolarité : à la fin du cycle 2, à la fin du cycle 3 et au plus tard à la fin de la 3ème : il s’agit du socle commun de connaissances.
À partir de 2011 la maîtrise du socle commun est obligatoire pour obtenir le DNB (Diplôme National du Brevet).

QUI ?

Théoriquement, l’ensemble des enseignants doivent valider les compétences qui correspondent en gros à ce qu’ils ont pu faire dans leur matière.

Exemple : la compétence 1 : “maîtrise de la langue française” est donc a priori plutôt validée par le professeur de lettres.

Mais cette compétence peut aussi être validée par celui d’Histoire/Géographie et finalement par bon nombre d’enseignants.
Les IPR insistent d’ailleurs sur le travail transversal et interdisciplinaire que ce livret permet. Mais nous verrons en quoi c’est un leurre.

Si les enseignants avec le professeur principal ne valident pas les compétences, le chef d’établissement peut le faire à leur place. Il peut d’ailleurs modifier lui-même des validations de collègues. Autant dire qu’en dernier recours nous, n’avons pas la main sur ce livret, contrairement à la présentation qui en est faite par les IPR qui nous vendent le LPC comme un outil pédagogique fabuleux.

QUOI ?

C’est bien le problème ! Compétences, items, sous items, le livret en primaire comme au collège est un vaste labyrinthe, une mise en abîme de notions parfois... abyssales justement ! Par exemple, dans la compétence 5 “la culture humaniste”, on trouve cet item : “Identifier la diversité des civilisations, des langues, des sociétés, des religions”. Rien que ça !!!

Quand les items ne sont pas tout simplement incompréhensibles, compétence 1 “maitrise de la langue française”, item : “Dégager par des moyens divers sa compréhension des textes variés” ; euh... c’est à dire ?

Puis viennent les items censés nous permettre d’évaluer le comportement, les savoir-êtres des élèves. Evaluation derrière laquelle se cache la plus grande subjectivité, comme la réduction à une norme de comportement quelque peu inquiétante ! Par exemple pour la compétence 5 l’item : “assumer des rôles” (sic !) “prendre des initiatives et des décisions” (on remarque au passage qu’il s’agit là des qualités d’un parfait manager Mac Do) ; mais si nous avons à faire à un élève qui veut juste rester près de la fenêtre à regarder passer les trains ? Ou encore cet autre item : “Etre sensible aux enjeux esthétiques et humains d’un texte littéraire”. Comment ça s’évalue, ça, la sensibilité (de 1 à 10 sur l’échelle de Richter ?)

MAIS EN FAIT, QU’EST-CE QU’UNE COMPÉTENCE ?

Justement, autre problème sur lequel il peut être intéressant de se pencher. Il se trouve qu’aujourd’hui il y a pléthore de définitions. Et le choix de l’une d’entre elles dévoile les enjeux intellectuels, politiques, économiques qui sont derrière.

Pour le ministère, le socle commun des compétences est “l’ensemble des connaissances, compétences, valeurs et attitudes nécessaires pour réussir sa scolarité”

Il est intéressant de noter un paradoxe : si le socle est un outil pour réussir sa scolarité, pourquoi alors n’est-il réduit qu’à une évaluation, qui sanctionne ou non la réussite ? On voit bien là que l’on veut nous faire passer le LPC pour une scie électrique qui permettrait la découpe en finesse de pièces de bois, alors qu’il ne s’agit que d’un vulgaire marteau juste bon à enfoncer des clous !

Le problème de l’évaluation est un problème très complexe ; et la note n’est en effet pas toujours satisfaisante. Mais avec le LPC, la complexité de l’évaluation est réduite à sa plus simple expression : valider ou ne pas valider. La techno de l’évaluation en mode binaire, voilà ce qu’on nous propose.

Il est aussi remarquable de ne définir cette acquisition que dans un but purement utilitaire et hautement problématique : réussir sa scolarité !

En effet, les définitions les plus retenues pour la compétence sont extrêmement utilitaristes : une compétence doit servir à quelque chose.

Quid alors d’une certaine inutilité par exemple de la culture ? Que dire de l’utilité de philosopher ? De faire des collages à la Braque ? Ou d’écouter pendant neuf minutes Thrènes pour les victimes d’Hiroshima ????? De se demander ce qu’est le vivant ou d’étudier les dinosaures ? Ou encore d’étudier le mouvement d’un palet lancé sur des coussins d’air ?????? Quelle utilité de faire réfléchir les élèves sur le monde dans lequel ils vivent ? À moins précisément qu’il s’agisse de ne plus trop réfléchir. Passer son temps à évaluer écrase la transmission du savoir et l’apprentissage de la réflexion.

L’OCDE ne retient qu’une définition de la compétence : elle doit être utile pour la vie quotidienne.

Mais là encore, qui s’arroge le droit de définir ce qui est utile pour la vie quotidienne ? Est-il plus utile de vouloir faire de l’argent ou de préférer rêver à un monde meilleur ?

Enfin, last but not least, remplir le livret de compétences est tout bonnement infaisable, si tant est qu’on cherche à lui donner un sens.
Un collègue d’histoire a tenté de faire un tableau de ce qu’il pourrait évaluer comme compétences à partir de ses séances d’histoire sur un niveau de 6ème : pour chaque élève, à chaque séance, il cherche à évaluer une compétence du livret. Il y a déjà quatre pages et elles ne concernent ni la géographie, ni l’éducation civique. Sans compter qu’une compétence non acquise en 6ème peut être à nouveau proposée à l’élève “non validé” en 5ème, 4ème puis 3ème ; bonjour l’organisation !

Résultat, le collègue passe un temps fou à chercher à évaluer et cela au détriment du contenu des savoirs et surtout de la méthode pour les transmettre. L’élève, quant à lui, est sans arrêt sur la sellette : l’évaluation devient une obsession, elle fige l’intellect et l’humain en oubliant ce qu’il peut devenir.

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